Hier, j’ai vu une femme pleurer dans la rue. Enfin, dans un passage très moche sous la gare de Lausanne au milieu des travaux et des palissades. Elle était appuyée contre une de ces clôtures, son téléphone dans une main, la tête dans le bras, dos à la rue…elle avait l’air tellement triste ! Ses sanglots m’ont prise aux tripes, ça m’a brisé le cœur, j’ai senti l’émotion monter et mes yeux se sont embués. J’ai hésité à l’aborder pour lui demander si je pouvais faire quelque chose pour elle, mais j’ai renoncé. Sachant que d’une part, dans ces moment-là, on a envie d’être seule, mais aussi et surtout parce que pleurer, c’est tabou chez nous. Pleurer en public, ça ne se fait pas, on a honte, on retient ses larmes et on se cache pour pleurer… . Tout cela a fait remonter plein de choses chez moi et je me suis aussi dit que si j’avais pleuré ainsi dans la rue, j’aurais été réconfortée qu’un.e inconnu.e me fasse un big hug, sans me poser de questions, juste pour me consoler et m’offrir son épaule réconfortante. Mais dans notre société, il y aurait peu de chance que cela se produise. Tout comme moi qui n’ai pas osé « déranger », je pense que d’autres personnes auraient certainement eu le même raisonnement.
En entendant pleurer cette femme, j’ai pensé que seul un homme pouvait provoquer de tels sanglots…et pourtant, je sais bien qu’elle aurait pu être effondrée pour plein d’autres raisons, mais mon intuition me disait que ce devait être un chagrin d’amour. ON NE DEVRAIT PAS PLEURER PAREILLEMENT POUR UN HOMME ! Et pourtant, c’est bien souvent à cause d’eux que l’on pleure. J’ai une collègue aussi, que j’ai vue si triste et désemparée pour un mec, ça m’a touchée. Encore une. Noooooon les filles, ce n’est pas être faible que de pleurer et laisser s’exprimer vos émotions. La faiblesse, c’est rompre une relation par un message what's app ou un mail…ça, c’est un sacré manque de courage (pour ne pas dire de couilles). Parce que ces mecs savent bien qu’ils ne supporteraient pas de vous regarder dans les yeux pour vous dire ce qu’ils pensent. Auraient-ils peur de pleurer avec vous ?
J’ai beaucoup repensé à cette femme et j’espère qu’elle va mieux. J’ai beaucoup pensé aussi à la place que l’on accorde aux larmes et aux pleurs dans notre culture, au regard des gens, au jugement. Et je me suis rappelée à quel point ça me mettait mal à l’aise lorsque mes enfants, petits, pleuraient en public pour exprimer leur colère ou leur tristesse. Qu’est-ce qu’on est conditionnés quand même pour être pareillement gênés! Je me suis rappelée aussi que bien souvent, mes enfants n’en avaient que faire de mes demandes de pleurer/crier moins fort, et tant mieux bordel ! Ils ne sont pas des moutons. Là, j’ai l’impression de partir dans tous les sens dans mon écriture..je ne sais pas ce que va donner ce papier et si je vais le publier tel quel ou le relire 20 fois !
Peut-être qu’on devrait repenser un peu la place des émotions dans notre société, peut-être qu’on devrait s’autoriser à être autre chose qu’heureux, peut-être devrait-on laisser la place aux larmes et aux cris. Parfois, je me suis demandée si j’étais folle ou anormale de ressentir les choses aussi intensément et les vivre avec autant de force, de passion ou de désespoir.
Je repense à cette femme et je suis encore triste pour elle, et en même temps, je réalise que c’est juste un instant de vie d’une personne parmi des milliers, allez 150'000 lausannois qui traversent aussi pour certains des moments difficiles…mais elle a partagé, bien malgré elle sûrement, sa détresse avec les gens qui l’ont vue. Et au même titre que je partage souvent une grande part de moi lorsque j’écris et je publie, c’est une façon de se mettre à nu, de se livrer alors que la pudeur, notre éducation ou la société nous dicte le contraire. C’est toujours un pas important pour moi de cliquer sur « publier » lorsque j’ai fini d’écrire. Il me faut souvent plusieurs jours et de nombreuses relectures, et je ne vous parle même pas de tous les textes que j’écris et que je renonce à publier.
Mais encore une fois je m’égare. J’ai vu cette femme pleurer, cela m’a touchée et attristée, j’ai eu envie de la consoler mais aussi de lui dire combien je trouvais courageux d’oser exprimer en pleine rue ses émotions. Je voudrais lui dire que je l’admire. Je voudrais lui dire que oui, c’est dur mais que si la vie était facile, ça se saurait, je voudrais lui dire qu’un jour, elle partagera son sourire, non pas avec les passants lausannois, mais avec la terre entière.
PS: je n'ai relu que 5-6 fois mon texte et rien touché d'autres que quelques coquilles et 2 virgules.
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